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Dimanche avant la Nativité du Christ

En ce dimanche avant la Nativité du Christ, nous avons entendu la lecture de l’évangile de Matthieu qui relate la généalogie du Christ (Mt 1, 1-17). Nous retrouvons également sa généalogie dans l’évangile de Luc (Lc 3, 23-38). Les deux récits font remonter la lignée de notre Seigneur au roi David, et de là jusqu’au patriarche Abraham. C’est là que s’arrête l’évangéliste Matthieu, alors que l’évangéliste Luc remonte jusqu’à Adam, qu’il présente comme « fils de Dieu » (Lc 3, 38). Entre Abraham et le roi David, les généalogies de Matthieu et de Luc diffèrent très peu. Par la suite, la généalogie selon Matthieu passe par le roi Salomon et se poursuit avec les rois de Juda, en suivant la généalogie du premier livre des Chroniques pour en arriver au Christ, le présentant ainsi comme l’héritier légitime du Royaume d’Israël. La généalogie de Matthieu, sans doute destinée aux Juifs, voulait montrer que Jésus-Christ était bien le Messie attendu, le « fils de David », c’est-à-dire l’héritier légitime des rois de Juda. Mais ces deux généalogies n’ont pas un objectif historique. Leur but est avant tout théologique : affirmer la foi en la messianité de Jésus. Étant de la descendance de David, il peut devenir le Messie, le « Roi des Juifs ».

Saint Irénée de Lyon a souligné à plusieurs reprises que Marie était la descendante de David et que « c’est de Marie encore vierge qu’à juste titre [le Verbe de Dieu] a reçu cette génération qui est la récapitulation d’Adam » (Contre les hérésies III, 21, 10). Saint Irénée poursuit sa réflexion en affirmant que « si le premier Adam a été pris de la terre et modelé par le Verbe de Dieu, il fallait que ce même Verbe, effectuant lui-même la récapitulation d’Adam, possédât la similitude d’une génération identique » (Ibid.).

Dieu est entré dans l’histoire !

L’Église nous rappelle ainsi que l’événement que nous nous préparons à fêter est un événement historique. Dieu est entré dans l’histoire ! Le Dieu sans commencement et qui ne peut être contenu se laisse contenir en un lieu et dans le temps ! Le Verbe de Dieu s’est fait chair ! Le Fils de Dieu est devenu fils de l’homme. Il a pris sur lui notre condition humaine. Il a pris sur lui notre corps humain afin de le sanctifier et de le libérer de la corruption, du péché et de la mort.

C’est pourquoi saint Irénée considère qu’ils « sont dans l’erreur ceux qui disent que le Christ n’a rien reçu de la Vierge, parlant de la sorte afin de rejeter l’héritage de la chair, mais rejetant du même coup la similitude » (Ibid., III, 22, 1). Il poursuit en disant : « Si en effet, Adam a reçu son modelage et sa substance de la terre par la main et l’art de Dieu, et si de son côté, le Christ ne les a pas reçus de Marie par cet art de Dieu, on ne pourra plus dire que le Christ ait gardé la similitude de cet homme qui fut fait à l’image et à la ressemblance de Dieu » (Ibid.).

La Nativité du Christ selon la chair est un événement qui donne tout le sens à notre vie

L’Église nous rappelle ainsi le sens de l’incarnation de Dieu. Saint Irénée nous explique que « Nous sommes un corps tiré de la terre et une âme qui reçoit de Dieu l’Esprit. (…) C’est donc cela même qu’est devenu le Verbe de Dieu, récapitulant en lui-même son propre ouvrage par lui modelé » (Ibid.). Le récit de la généalogie du Christ nous rappelle la réalité de l’incarnation et de ce fait, que la Nativité du Christ selon la chair est un événement qui donne tout le sens à notre vie. C’est pourquoi le saint apôtre Paul parle de Dieu et de : « son Fils né de la postérité de David, selon la chair, et déclaré Fils de Dieu avec puissance, selon l’Esprit de sainteté, par sa résurrection d’entre les morts, Jésus-Christ notre Seigneur » (Rm 1, 3-4).

En fêtant la Nativité du Christ, ce n’est ni une fable, ni une légende que l’Église célèbre, mais l’événement extraordinaire et singulier du Dieu fait homme. Depuis des siècles, le personnage de Jésus de Nazareth n’a cessé d’intriguer les hommes. Etait-il un prophète, un sage, un philosophe, un maître à penser, un magicien, un rabbin, un illuminé — autrement dit un homme, un simple homme qui serait à un moment devenu Dieu ? Non, affirme l’Église qui depuis toujours le confesse non pas comme un homme devenu Dieu, mais comme le Dieu devenu homme, « vrai Dieu de vrai Dieu », « engendré, non créé, consubstantiel au Père par qui tout a été fait (…) qui pour nous autres hommes et pour notre salut, est descendu des cieux, s’est incarné et s’est fait homme » déclara le premier concile œcuménique.

L’Église depuis toujours confesse le Christ comme le Dieu devenu homme

L’Église célèbre le Christ né à Bethléem, « le même parfait en divinité, le même parfait en humanité, véritablement Dieu, véritablement homme, (…) consubstantiel au Père selon la divinité, et consubstantiel à nous, le même, selon l’humanité, semblable à nous en tout sauf le péché, avant les siècles engendré du Père selon la divinité, et aux derniers, jours, le même pour nous et pour notre salut, de Marie la Vierge, la Théotokos, selon l’humanité, un seul et le même Christ, Fils, Seigneur, Unique Engendré, reconnu en deux natures sans confusion, sans changement, sans division, sans séparation », comme l’affirma le quatrième concile œcuménique.

L’homme ne pouvait à lui seul se libérer de la captivité de la corruption, du péché et de la mort. Seul Dieu pouvait le secourir, le guérir et le sauver. Mais si Dieu ne s’était pas fait homme, « ce qui n’aurait pas été assumé n’aurait pu être sauvé », comme l’a remarqué saint Athanase d’Alexandrie. Tel est le sens véritable de la fête de Noël, telle est la profondeur du grand mystère de notre foi dont parle le saint apôtre Paul, « celui qui a été manifesté en chair, justifié par l’Esprit, vu des anges, prêché aux Gentils, cru dans le monde, élevé dans la gloire » (1 Tim 3, 16). Nous apprêtant à célébrer de nouveau cette année la fête de la Nativité du Christ, rendons grâce à Dieu pour le grand mystère de notre salut : de sa venue parmi nous, en devenant homme, tout en restant Dieu, afin de nous accorder le plus grand don : celui de participer à la vie divine (2 Pi 1, 4). A Celui qui vient, qui est venu, et qui viendra, gloire et adoration dans les siècles des siècles. Amen.

Archevêque Job de Telmessos

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