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Deuxième dimanche du Carême

Nous venons d’étendre la lecture d’un passage de l’évangile de Marc relatant la guérison d’un paralytique (Mc 2, 1-12). Ce miracle nous est bien connu. Dans les évangiles, nous retrouvons deux récits de guérison d’un paralytique : celle du paralytique de Capharnaüm que nous relatent les évangiles synoptiques (Marc, Matthieu et Luc), que nous venons d’écouter et que notre Église a choisi pour ce deuxième dimanche du Carême, et celle du paralytique de la piscine de Bethesda que nous raconte l’évangéliste Jean (Jn 5, 1-18) et que nous lirons le quatrième dimanche de Pâques.

Dans l’évangile d’aujourd’hui, l’accent est mis sur la foi du paralytique qui le mène vers notre Seigneur et Sauveur Jésus-Christ. Porté par quatre personnes, voyant la foule nombreuse qui entoure le Christ dans la maison où Il enseignait, le voici descendu par le toit et présenté au Seigneur qui, « voyant leur foi », nous dit l’évangéliste, lui dit : « Mon enfant, tes péchés sont pardonnés ».

Ce miracle est une théophanie : une révélation du Dieu-homme

Dans ce miracle, notre Seigneur et Sauveur Jésus-Christ se révèle avant tout comme comme le Fils de Dieu incarné. « Comment cet homme parle-t-il ainsi ? Il blasphème ! Qui peut pardonner les péchés, sinon Dieu seul », murmurent les scribes (Mc 2, 7). C’est pour eux que le Christ se manifeste comme Dieu. Ce miracle est une théophanie : une révélation du Dieu-homme. Commentant ce miracle, saint Irénée de Lyon nous dit : « En remettant les péchés, le Seigneur n’a pas seulement guéri l’homme, Il a aussi révélé clairement qui Il était. En effet, si personne ne peut remettre les péchés, sinon Dieu seul, et si le Seigneur les remettait et guérissait l’homme, il est clair qu’Il était le Verbe de Dieu devenu fils de l’homme, ayant reçu du Père le pouvoir de remettre les péchés parce qu’Il était homme et parce qu’Il était Dieu » (Contre les hérésies 5, 17, 3).

Il serait facile à un homme de blasphémer en prétendant pouvoir remettre les péchés ; mais il lui serait impossible d’accomplir un miracle. Pour montrer qu’Il est le Dieu-homme, notre Seigneur pardonne les péchés et accomplit le miracle. Il répond aux scribes en disant : « Afin que vous sachiez que le Fils de l’homme a sur terre le pouvoir de pardonner les péchés, je te l’ordonne, dit-il au paralytique, lève-toi, prends ton lit, et va dans ta maison » (Mc 2, 10-11).

Le paralytique représente Adam qui à son tour représente toute l’humanité

Pour les Pères de l’Église qui ont fait une lecture spirituelle de cette péricope, le paralytique représente le premier homme, Adam, qui à son tour représente toute l’humanité. Sa paralysie symbolise la condition humaine après la chute. Saint Irénée affirme : « C’est pour avoir transgressé les commandements de Dieu qu’il était devenu pécheur, et la paralysie avait été la conséquence des péchés » (Contre les hérésies 5, 17, 1-3). Puisque le paralytique représente Adam qui symbolise l’humanité toute entière, chacun d’entre nous peut se reconnaître en tant que pécheur sous les traits du paralytique de l’évangile de ce dimanche.

Or, ce n’est pas un hasard que nous lisons ce passage de l’évangile pour ce deuxième dimanche du Carême. Notre Église, dans la mystagogie que nous propose le Triode du Carême, nous a rappelé juste avant le commencement du Carême l’exil d’Adam hors du Paradis. Durant les dimanches préparatoires, par la parabole du Fils Prodigue, elle nous a invité à retourner vers la maison du Père par notre conversion. La semaine dernière, elle nous présentait le Christ qui vient vers nous et qui voit notre condition déchue, comme le Verbe de Dieu a vu Adam couvert de feuilles de figuier au Paradis. A son tour, la péricope de ce dimanche nous invite à la guérison et à la rémission des péchés. Nous devons accourir vers le Christ Sauveur avec foi et dans un élan de conversion afin d’être guéris de nos faiblesses et être pardonnés de nos péchés.

« Lève-toi, prends ton lit, et va dans ta maison » (Mc 2, 11) – sont les paroles du Christ adressées au paralytique. L’ordre de se lever évoque déjà la résurrection. Littéralement, ressusciter, c’est se lever des morts. Le fait de porter son lit, son grabat, signifie pour les Pères de l’Église la maîtrise des passions de la chair, mais peut aussi évoquer le Christ qui porte la Croix sur laquelle Il a cloué la cédule de nos péchés, c’est-à-dire la totalité de nos péchés afin de nous sauver. L’ordre au paralytique guéri de rentrer dans sa maison est une figure du retour de l’homme au Paradis, comme le retour du Fils prodigue à la maison du Père.

Toute la mystagogie du Triode du Carême porte sur le retour de l’homme au Paradis

Toute la mystagogie du Triode du Carême porte sur le retour de l’homme au Paradis, après la chute de nos premiers parents, Adam et Eve. Ce retour au Paradis est rendu possible par l’incarnation du Fils et Verbe de Dieu qui vient vers nous et qui n’attend que notre conversion pour nous guérir, pour nous sauver, à travers sa mort sur la Croix et sa résurrection le troisième jour.

Ainsi, la marche du Paralytique avec son lit figure et annonce la résurrection de l’humanité qui est rendu possible par la résurrection du Christ. Saint Hilaire de Poitiers, commentant ce miracle, affirme : « D’abord [Jésus] a accordé la rémission des péchés ; ensuite Il a montré le pouvoir de la résurrection, et Il a alors enseigné par le port du lit que la faiblesse et la douleur n’atteindront plus les corps ; enfin, par le retour vers la demeure propre, il a montré que serait rendu aux croyants le chemin du Paradis qu’avait quitté le père de tous les hommes, Adam, débilité par la souillure du péché » (Sur Matthieu 8, 7).

En ce deuxième dimanche du Carême, l’évangile nous rappelle notre état de péché, qui est une maladie spirituelle dont seul le Dieu-homme, notre Seigneur et Sauveur Jésus-Christ peut nous délivrer. Sous les traits du paralytique, le pécheur est relevé, rendu capable de marcher dans les voies de Dieu, grâce au mystère du baptême qui est notre participation personnelle à la mort et à la résurrection du Christ. Puissions-nous, à l’exemple du paralytique de Capharnaüm, approcher le Christ avec foi, afin d’être relevé par lui de la mort et du péché, afin de rentrer dans notre maison paternelle, ce Royaume de Dieu qui nous a été préparé, et où revient gloire et adoration, au Père et au Fils et au Saint Esprit dans les siècles des siècles. Amen.

Archevêque Job de Telmessos

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