Français, Homélies

Neuvième dimanche après la Pentecôte

Nous venons d’entendre un passage de l’évangile selon Matthieu qui nous est bien connu : celui de la marche sur les eaux (Mt 14, 22-34). Il fait suite au récit de la multiplication des pains que nous avons lu la semaine dernière. Après avoir renvoyé la foule, notre Seigneur monta sur la montagne, pour prier à l’écart, pendant que ses disciples étaient montés dans une barque pour passer sur l’autre rive. Le soir était venu. Les disciples sont dans la barque au milieu de la mer agitée. À la quatrième veille de la nuit, le Seigneur va vers eux, marchant sur la mer. Les disciples sont troublés, pensant voir un fantôme ! Le Seigneur les rassure : « C’est moi ; n’ayez pas peur ! » Pierre, pour vérifier que c’est bien le Seigneur, lui demande de lui ordonner d’aller vers lui en marchant sur les eaux. Le Christ l’appelle aussitôt : « Viens ! » Pierre sort de la barque, marche sur les eaux, mais ayant subitement peur commence à s’enfoncer et s’écrie : « Seigneur, sauve-moi ! » C’est alors que le Christ lui tend la main et le réprimande : « Homme de peu de foi, pourquoi as-tu douté ? » Alors les apôtres vinrent se prosterner devant le Christ en confessant : « Tu es véritablement le Fils de Dieu ! ».

Ce même récit se retrouve dans l’évangile de Marc et de Jean (Mc 6, 47-51 et Jn 6, 16-21). Ce récit nous livre un enseignement dans le langage symbolique de la Bible. La mer et ses flots représente notre vie tumultueuse. « Lorsque je vois la mer de cette vie soulevée par la tempête des tentations, j’accours à ton havre de paix et je te crie, ô Dieu de bonté : À la fosse rachète ma vie ! » chantons nous dans notre hymnographie. La mer est parfois calme, paisible, comme l’est aussi notre vie à certains moments. Parfois, elle est agitée, comme nous le sommes aussi à d’autres moments, tourmentés que nous sommes par des soucis, des épreuves, des maladies, des tristesses ou des malheurs. La barque symbolise l’Église qui nous aide à traverser cette vie. Il est intéressant de noter que le Christ ordonne à ses disciples de monter dans la barque pour passer à l’autre rive. Alors qu’ils s’y trouvent, le Christ leur apparaît, venant vers eux, les ayant donc précédés sur l’autre rive. L’autre rive symbolise le Royaume à venir où le Seigneur nous attend. Et c’est l’Église qui est la barque qui nous y conduit.

La mer et ses flots représente notre vie tumultueuse, la barque symbolise l’Église qui nous aide à traverser cette vie, l’autre rive — le Royaume à venir où le Seigneur nous attend

Commentant ce passage, Origène, un grand didascale de l’Église du IIIe siècle, écrit : « S’il nous arrive d’être exposés à des tentations inévitables, rappelons-nous que Jésus nous a obligés à monter dans la barque et qu’il veut que nous le précédions sur l’autre rive. A la vérité, il est impossible d’atteindre l’autre rive sans supporter l’épreuve des vagues et du vent contraire. Lorsque nous nous verrons assaillis de nombreuses et graves difficultés, et que nous serons fatigués d’effectuer cette traversée avec des moyens modestes et limités, pensons que notre barque arrivant alors au milieu de la mer est tourmentée par les flots, qui veulent que nous fassions naufrage dans la foi ou dans quelque autre vertu. Mais lorsque nous verrons l’esprit du Mauvais combattre nos entreprises, pensons qu’alors le vent nous est contraire » (Commentaire sur l’évangile de Matthieu, 11, 6).

La vie sur terre est une préparation pour la vie éternelle; c’est la raison pour laquelle est remplie d’épreuves que Dieu accorde ou permet

La vie que nous menons sur terre, passagère, est une préparation pour la vie dans le Royaume à venir, éternelle. C’est dans ce sens qu’elle est pour nous une école. Et c’est la raison pour laquelle est remplie d’épreuves que Dieu accorde ou permet. Par elles, Il veut éprouver notre foi. Dans le récit d’aujourd’hui, Pierre tente pour ainsi dire le Seigneur, pour vérifier son identité, en lui demandant de lui ordonner de marcher vers lui sur les eaux. Mais notre Seigneur l’éprouve à son tour, en lui ordonnant de venir. Etant sorti de la barque, Pierre commence à avoir peur en voyant qu’il s’enfonce et demande au Seigneur de le sauver. Les paroles du Christ sont alors bien parlante : « Homme de peu de foi, pourquoi as-tu douté ? » (Mt 14, 31).

Ces paroles sont pour nous un enseignement pour notre vie. Chaque fois que nous sommes éprouvés, soucieux, triste, malheureux ou malades, nous ne devons pas manquer de foi. Si nous manquons de foi, alors nous nous enfonçons, comme Pierre, dans la mer de cette vie. Mais si au contraire, nous nous tournons avec espérance vers le Seigneur dans la prière, en nous écriant : « Seigneur, viens à mon aide, Seigneur, viens à mon secours ! » (Ps 38, 22), alors Il nous tendra la main, comme à Pierre, et nous aidera à traverser cette mer tourmentée.

C’est moi ; n’ayez pas peur !

Alors que les apôtres traversaient la mer agitée, le Christ leur est apparu en leur disant : « C’est moi ; n’ayez pas peur ! ». N’ayez pas peur ! Tel est ne message que notre Seigneur nous adresse, nous qui traversons la mer de cette vie. N’ayez pas peur ! Le Christ répète ces mots à plusieurs reprises. Il les prononce à ces disciples, marchant vers eux sur les flots de la mer. Mais c’est aussi ce qu’Il dit à Pierre, Jean et Jacques, les relevant après sa transfiguration sur le Tabor (Mt 17, 7). Ce sont aussi les paroles de l’ange, s’adressant aux femmes myrrophores et leur annonçant la résurrection : « Pour vous, n’ayez pas peur, car je sais que vous cherchez Jésus le crucifié ! » (Mt 28, 5). Et ce sont également le commandement de notre Sauveur à celle-ci, leur demandant d’aller trouver les apôtres : « N’ayez pas peur ! Allez annoncer à mes frères qu’ils aillent en Galilée, et là ils me verront » (Mt 28, 10).

Nous vivons dans un monde où beaucoup de choses nous font peur. Dans ce monde où la violence, les crimes et le terrorisme ne cessent d’augmenter, il peut nous arriver d’avoir peur de sortir de chez soi, par crainte de nous faire agresser. Il peut nous arriver d’avoir peur de prendre des risques, par crainte d’échouer. Il peut nous arriver d’avoir peur par crainte de l’avenir, par crainte de ce qui va arriver le lendemain. La peur peut nous tenir ainsi en captivité. La peur nous empêche aussi de confesser publiquement notre foi et de prêcher l’Évangile dans le monde. La peur nous apporte des tourments et des angoisses. Elle peut même nous empêcher d’accomplir la volonté de Dieu. La peur est tout simplement l’opposé de la foi. Hélas, beaucoup de personnes passent à côté du plan de Dieu parce que la peur domine leur vie. Or, le message que nous apporte le Christ est de ne pas avoir peur, car Dieu nous a affranchis de la peur en nous donnant la foi !

Rendons grâce à Dieu pour cela ! Montons dans la barque qu’est l’Église, et allons sans crainte à travers la mer de cette vie vers l’autre rive, vers Son Royaume céleste, avec foi. N’ayons crainte, mais appelons-le sans cesse par la prière : « Seigneur Jésus-Christ, Fils de Dieu, aie pitié de moi, pécheur ! » Alors nous le rencontrerons sur notre route, toujours prêt à nous secourir, à nous tendre la main comme à Pierre, chaque fois que nous commencerons à sombrer ou à couler dans les flots de la mer agiter. A lui, notre Dieu et Sauveur, gloire et adoration dans les siècles des siècles. Amen.

Archevêque Job de Telmessos

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